Regain dispositif
REGAIN DISPOSITIF
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Cette proposition a alimenté le numéro 142 de la revue sorti à l'automne 2023.
C’est un peu comme si on avait échappé à la mort : ce qui nous reste à vivre ce n’est que du bonus. Ou bien pourrait-on reprendre cet adage : la culture, c’est ce qui reste quand on a tout oublié. Voilà notre défi : faire de ce numéro 142 de la revue quelque chose de très optimiste.
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Comme embrayeur, choisissons un très bref extrait de roman, quelque chose de particulièrement écrit. Certains diront un extrait de Giono, bien sûr, histoire de se mettre immédiatement dans le ton. Ou bien, simplement, un fait du quotidien.
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Nous allons travailler cet extrait dans sa totalité sur le pôle idéel (ce que raconte, ce que suggère, ce que révèle en lui chacun des mots, chacune des expressions). Mais aussi, en extension dans tous les sens, sur son pôle matériel (la matérialité des mots, les anagrammes ou presque anagrammes, les sonorités et allitérations). Nous constituons ainsi une matière à texte.
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De cette matière va naître un premier écrit d’une dizaine de lignes. Dans l’effervescence (rappelons-nous ce que dit Ricardou de l’écriture effervescente).
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Retravail du texte initial avec en tête les principes suivants :
- repérer ce qui est en germe et promet belle fenaison
- faire pousser, enfler, grandir
D’où naîtra notre texte second.
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Le mieux, dès lors, c’est que nous soyons à plusieurs. Où si l’on est seul qu’on propose à trois ou quatre personnes (son conjoint, une amie de passage, un voisin, la factrice, un enfant) de faire dans ce texte sa récolte, le prélèvement d’un bref fragment qui lui plaît particulièrement. Attention : couper mais ne pas arracher ! Notre texte est éclairci mais pas dévasté. On n’épuise jamais la ressource. Certes, ce qui a été prélevé, ce sont les beaux morceaux. Ils ont été consommés, où gardés au grenier pour l’hiver. Il n’est donc pas question pour nous de les réutiliser.
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Il reste peu, en apparence. Mais l’essentiel, ce qui va permettre une nouvelle fructification, la repousse. Chacun des mots restants, des expressions, va dès lors proliférer selon cette pratique tellement féconde : les développer à nouveau, sur ses axes matériel et idéel.
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Réécriture. Une ondée bienfaisante et le soleil bienveillant de l’écriture font gonfler la matière vivante du futur texte. Les mots ont proliféré et la sève des idées se lève. Le texte s’enracine. Comme nous l’a enseigné Ricardou, la graphie excite sourdement le désir d’écrire.
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Après quelques élagages ou désherbages, notre texte est prêt.