En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies pour vous proposer des contenus et services adaptés.
Mentions légales.
 
 
 
Vous êtes ici :   Accueil » Anagrammes
    Imprimer la page...

Anagrammes

Le numéro 93 de Soleils & cendre (mars 2010) était consacré à un travail formel :

 

"ANAGRAMMES"

 

Il s'agissait de travailler, non sur des anagrammes de mots ou de phrases, mais sur des textes entiers, dont les différentes versions anagrammatiques contribuent à révéler les multiples masques.

Les dispositifs ci-dessous restent disponibles pour tous ceux qui veulent se confronter à ce défi d'écriture.

 

RIMBAUD ou RADIUM B ?

Pour commencer  : réaliser l'exacte anagramme du Dormeur du val de Rimbaud (titre compris).

Le dormeur du val

C'est un trou de verdure où chante une rivière,
Accrochant follement aux herbes des haillons
D'argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons.

Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l'herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.

Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme :
Nature, berce-le chaudement : il a froid.

Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine,
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.

Arthur RIMBAUD   (1854-1891)

 

Autre proposition, pour les téméraires qui sont allés au bout du défi : mettre leur texte en scène, dans son rapport à l'œuvre originale : perspective patahistorique, exégèse patascientifique, analyse zutique...

 

 

CITATION : Ô TITANIC !

 

Anagramme d'une citation (MP Canard) : gamme d'entraînement ludique

Choisir une citation, puis en réaliser successivement plusieurs anagrammes. Voir ensuite comment on peut articuler ces productions : place à l'inventivité.

Par exemple, voici ce que Marie-Pierre Canard a fait du fameux aphorisme d'Eluard :

 La terre est bleue comme une orange


1 . L’orage sème brune nue, écarte le mot.
 
2. En somme la rage, brûle, écorne et tue.
 
3. Une : l’Ecart en mot remue le sage orbe.
 
4. La rage butée cerne, rue et nomme l’os.
 
5. L’ombre use et glace une arène morte.

 

PRESSE PEOPLE = PELÉ, OPPRESSÉ

 

Anagramme d'un article banal (C. Bélézy) :

Choisir dans la presse, la publicité ou tout autre écrit banal, un (court) article ou extrait d'article. Le choisir bien trivial, bien creux, bien dans l'idéologie dominante ou véhiculant des poncifs (tiens, cela nous fait penser à une contribution sur le site du sinistère de "l'identité nationale", par exemple). En réaliser l'anagramme : changer le plomb vil en or poétique pur (pure poïésis). Pouvoir de chacun à réenchanter la matière en la langue.

Contribution ici de Marie-Pierre Canard pour quelques Unes du Dauphiné Libéré



Dauphiné Libéré : Bien haïr le dupe ou Phare béni de Lui


Le Gac se suicide en prison .... : Un gros silence d'ici a pesé ...


Repas de famille : c'est sacré ! : La place de tes cris se ferma


Braquage dans une station service : Vague de satin, qui, brassant, écorne


En six secondes la vie d'un peuple a basculé : Un poulpe né des cieux dévala : silences bas


Des clandestins débarqués près de Bonifacio : La force qui décide ne brandit pas ses bons dés

 

 

MONDES et DÉMONS

 

Dispositif pouvant déboucher sur un atelier (C. Bélézy, Y. Béal) :

A partir de l'idée (C. Niarfeix) que l'anagramme serait (voir n°92 de S&C) une autopsie du monde fini que constituerait le texte lui-même.

  • Représenter le monde par un cercle.
  • Inscrire dans ce cercle les mots qui vous viennent à l'esprit en pensant au monde : associations d'idées, constitution d'un matériau sur le pôle idéel.
  • Entre les mots, il reste des interstices ; de quoi densifier la matière ; la matière du monde est constituée de molécules et d'atomes ; la matière des mots du monde, ses molécules et ses atomes, ce sont ses lettres et ses sonorités. Alors, dans les interstices de la matière du monde, entre les mots inscrits au cercle, inscrire d'autres mots, par anagramme (exacte ou incomplète ou approximative) : constitution d'un matériau complémentaire sur le pôle matériel de la langue.
  • Avec ce matériau, écrire un texte T1 : anagramme du monde. On vise un texte bref, très bref, eu égard à la suite du dispositif. On vise une première vision du monde. Ce texte étant arrêté — monde fini — on n'y touchera plus : condition essentielle.
  • Réaliser une première anagramme du texte T1. Nouvelle vision du même monde. Exercice de votre pouvoir de transformation sur le monde.
  • Réaliser une seconde anagramme du texte T1. Troisième vision du monde. Confrontation avec un nouveau point de vue. Exercice de votre capacité de décentration.
  • Livrer les trois états à la revue.

 

DOT ENRHUMÉE D'UN THÉORÈME

 

Le texte anagrammatique de lui-même (H. Tramoy) : pirouette, paraphrase de Mallarmé

  • Raisonnement par l'absurde :

Imaginons un texte virtuel A. Imaginons son anagramme virtuelle A'. Imaginons un texte B qui soit l'exacte anagramme de la somme des textes A et A' : ce texte comportera un nombre de lettres égal à la somme des nombres de lettres des textes A et A' ; le texte B comportera donc un nombre pair de chacune des lettres différentes qui y seront présentes.

  • Théorème :

Si un texte est composé d'un nombre pair de chacune de ses lettres différentes, alors, il constitue la somme anagrammatique de deux textes virtuels dont chacun est l'exacte anagramme de l'autre.

  • Définition :

Un texte anagrammatique de lui-même est un texte dont le nombre de chacune des lettres différentes qui le composent est pair.

  • Défi d'écriture :

En utilisant la définition ci-dessus, composer un texte anagrammatique de lui-même (on pourra par ailleurs utiliser une partie du dispositif précédent, Mondes et démons).

  • Défi du défi (à destination de l'auteur ou de son lecteur) :

À partir du texte qui vient d'être composé (de type B), retrouver deux textes souches, anagrammatiques l'un de l'autre (de type A et A').

Si un nombre n d'opérateurs se livrent à la même opération sur le même texte, nous obtiendrons alors un nombre de textes de type A et A' égal à 2n.

Où l'on voit qu'un texte anagrammatique de lui-même contient potentiellement une infinité de textes souches, donnant de ce texte une infinité de variantes.

Ne serait-ce pas la même chose pour le monde ? N'y aurait-il pas une infinité de manière d'en administrer chacune des contrées, des recoins, des étendues ? Et alors, la croyance dans la toute-puissance univoque du capitalisme et de ses avatars pour administrer le monde ne serait-elle pas qu'une imposture ?

 


Date de création : 27/10/2009 19:00
Dernière modification : 20/03/2010 23:47
Catégorie : - Ateliers d'écriture
Page lue 10304 fois